La maison du Lys
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Extrait
| I
La petite boutique de Marie-Françoise Le Bail présentait un aspect vraiment attirant, en cette soirée de novembre, glaciale et embrumée.
Un feu superbe crépitait dans la grande cheminée ; une lampe de cuivre projetait sa gaie lumière sur le petit comptoir garni de balances étincelantes, de grosses mottes d’un appétissant beurre jaune, de bocaux de pruneaux et de friandises diverses. Le long des murs s’alignaient les tiroirs et, au-dessus, les planches supportant des pains de sucre, des boîtes de conserves... toutes choses vendues par l’épicière avec bien d’autres encore, recelées par ces profonds tiroirs où les ménagères du quartier trouvaient les objets les plus divers.
Marie-Françoise avait l’air accueillant comme son petit magasin. Une coiffe bien blanche cachait ses cheveux et encadrait son honnête et doux visage ; un irréprochable tablier bleu protégeait sa robe, qui avait conservé la forme de celles des aïeules... Cette petite femme à l’allure paisible avait, de l’avis de tous, le cœur sur la main. Son seul défaut était le désir trop vif de connaître toutes les nouvelles de sa petite ville.
En ce moment, elle avait abandonné son tricot et écoutait, sans en perdre une syllabe, l’histoire sensationnelle contée par une voisine. Celle-ci, venue acheter pour cinq sous de fil, s’était commodément installée devant le feu et débitait son récit d’une voix monotone,
À l’autre extrémité du comptoir, une jeune fille qui cousait, à l’arrivée de la narratrice, s’était interrompue et l’écoutait avec un intérêt ardent. C’était une petite personne trapue, au large visage rougeaud, riant et ouvert, la coiffe du pays ne couvrait pas sa chevelure d’un châtain clair, bien arrangée à la dernière mode, et, au-dessus de la large bavette de son tablier bleu, apparaissait la garniture un peu compliquée de son corsage.
– Est-ce bien vrai, mère Pernick, ce que vous racontez là ? dit-elle tout à coup en se penchant un peu vers la voisine.
– Comment ! si c’est vrai ! Je le tiens du cousin de la bru du sacristain de Sauvecloche... Est-ce peu crédule, ces jeunesses ! Ta tante ne m’a pas fait cette question-là ; elle sait bien que Louise Pernick ne ment point !...|