La lampe ardente
Om bogen
Extrait
| I
En quelques traits rapides, Raymond acheva le dessin commencé, puis il leva les yeux et regarda longuement la vue qu’il venait de reproduire.
Il se trouvait sur une terrasse rocheuse, entourée de pins et de bouleaux. Le regard plongeait dans la gorge au fond de laquelle bouillonnait, invisible, la torrentueuse petite rivière ; en face, il rencontrait un roc énorme, couleur de fumée, strié de roux, dressé entre les sapins et les hêtres couvrant tout ce qui n’était pas la roche nue.
À la fin de ce gris après-midi, un peu de lumière paraissait, diffusée par le soleil abaissé à l’horizon derrière un long nuage couleur de perle. Cette clarté légère touchait timidement le sommet du grand roc, caressait les arbustes qui se penchaient vers la fraîcheur humide de la rivière, sur le versant de la gorge où se voyait la petite terrasse aux balustres de sapin rouge fleuris de roses géraniums à longues traînes.
Dans cette solitude, le silence n’était troublé que par le bouillonnement du torrent. Mais bientôt, Raymond perçut un bruit de pas. En se détournant, il vit une jeune fille s’avancer dans l’allée de pins qui montait jusqu’à la terrasse. L’ombre environnante faisait paraître plus claire la fine silhouette vêtue d’une robe légère couleur de lavande, le teint délicat, les cheveux blonds. Les petits souliers de daim gris semblaient frôler le sol couvert d’aiguilles de pins.
Raymond sourit, en demandant :
– Tu viens me chercher, Paule ?
– Mais non, mon ami. Six heures sonnent seulement. Je suis à la recherche d’Ariane, qui doit se promener de ce côté.
– Je ne l’ai pas vue, cependant.
– Elle viendra certainement ici. Attendons-la, veux-tu ?
– Mais oui. Pourvu que je sois rentré un peu avant le dîner pour mettre mon smoking, cela suffit.
Tandis qu’il parlait, la jeune fille montait les quelques marches rustiques menant à la terrasse. Raymond lui offrit sa main pour gravir la dernière. Elle s’appuya sur lui en le remerciant d’un sourire...|