Sous l’Occupation et le régime de Vichy, voici la tragédie d’un homme quelconque aux prises avec l’absurdité d’un pouvoir sans visage, qui frappe dans l’ombre faute d’être capable d’aller jusqu’au bout de sa logique totalitaire. Le drame de Bridet, gaulliste et résistant, est de ne pouvoir se battre à découvert contre un adversaire qui se dérobe. La souricière se met inexorablement en place autour de ce héros négatif dont on ne saura jamais les véritables mobiles.
Mais qui est donc ce Bridet ? Un pauvre type, un retors subtil, un lâche obnubilé par sa peur, un orfèvre dans l’art du double jeu ? L’écriture dépouillée de l’auteur donne plus de force à l’horreur de cette guerre civile larvée et impitoyable. Un réalisme terrible, un décor vide quasi irréel, une minutie de détails concrets, une conspiration silencieuse qui accable les personnages. Un roman kafkaïen, une nasse qui se referme inexorablement dans la nuit et le brouillard de ces héros, de ces victimes et bourreaux, dans un paysage sans mémoire. Un roman noir, angoissant, qui laisse des traces.