La petite chanoinesse
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Extrait
| I
Les hôtes d’Ogier de Chancenay prenaient le thé, en cet après-midi de septembre, sur le pont du yacht mouillé devant un petit port italien. Ils avaient sous les yeux le village, avec ses maisons disséminées dans un désordre pittoresque, ses jardins à demi cachés derrière le feuillage d’énormes figuiers chargés de fruits, ses bois d’oliviers et d’orangers caressés par le soleil déclinant. Des barques, leurs voiles rousses tendues, rentraient chargées de poisson, montées par des hommes au teint brun qui saluaient au passage les étrangers. Elles allaient s’amarrer le long du port, où les femmes aux cheveux sombres à moitié couverts d’un fichu écarlate se tenaient prêtes à enlever le produit de la pêche. Et des enfants aussi bruns que père et mère couraient, se poursuivaient, nu-pieds, en jetant des cris aigus, ainsi que les corneilles aux soirs d’été.
William Horne, un jeune Anglais à la physionomie intelligente et fine, dit à son voisin, le gros baron de Pardeuil :
– Joli, hein, ce village ?
L’autre avança la lèvre, en une lippe qu’il croyait sans doute du plus agréable effet.
– Joli ?... Peuh ! Tout cela se ressemble !... Moi, vous savez, la nature...
Et il fit claquer ses doigts.
William retint un sourire narquois, en demandant :
– Alors, comment avez-vous accepté l’invitation de Chancenay pour cette croisière ? Vous devez vous ennuyer terriblement, si la vue de ces charmants paysages ne vous dit rien ?
– Mais non, mais non, je ne m’ennuie pas ! On mange admirablement, chez M. de Chancenay ! Il a pour chef un véritable artiste !... Et puis, comment trouver le temps long, en une si aimable compagnie ?...|