L’infidèle
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Extrait
| I
Une porte s’ouvrit lentement, une voix ouatée annonça :
– Son Excellence le marquis Orcella.
La comtesse Riesini laissa tomber le lorgnon d’écaille qu’elle maintenait sur son nez majestueux, ferma le livre ouvert devant elle, sur la petite table à dessus de porphyre, et sourit au visiteur.
– Je vous attendais un peu aujourd’hui, Silvio.
Le marquis s’avança, inclina sa taille mince et baisa la main qui lui était offerte.
– Vous aviez bien voulu me demander de venir vous voir, ma cousine...
– Oui, pour causer un peu sérieusement... Allons, Silvio, ne froncez pas les sourcils ! Il faut être raisonnable, mon pauvre enfant !
Un frémissement avait couru sur le visage mat, un peu osseux, et les sourcils sombres qui formaient un bel arc au-dessus des yeux noirs se rapprochaient lentement. Don Silvio dit avec effort :
– Oui, je le sais. Mais c’est si dur !... Mettre à sa place une autre femme... que je n’aimerai pas, que je n’aimerai jamais !
– Voyons, qu’en savez-vous ? L’amour peut venir...
Il dit lentement :
– Jamais.
Son visage se tendait et sur le regard lointain, l’ombre de tristesse se fit plus profonde.
Il s’était assis près de la petite table et sa main fine, nerveuse, s’appuyait au dessus de marbre. La comtesse, pendant un moment, considéra le visage aristocratique sur lequel les yeux d’un noir voilé, songeurs et pleins de pensées, répandaient une beauté grave. Puis elle hocha la tête en murmurant :
– Silvio, Silvio, j’espérais vous trouver prêt à accomplir votre devoir !...|